Réalisation de vos courbes d’étalonnage : comment éviter les sources d’erreur
L’exactitude des données d'étalonnage est la base de toute quantification. Mais une courbe d'étalonnage parfaite nécessite beaucoup de travail. Les sources d’erreurs potentielles sont nombreuses et il est donc utile de savoir comment garantir la précision et l'exactitude. Pour éviter les pertes de temps ou des rendus de résultats non fiables liés à de mauvaises courbes d'étalonnage, voici quelques conseils. Divers problèmes d’instruments peuvent être à l’origine d’une courbe d'étalonnage inacceptable mais cet article est consacré spécifiquement à la préparation et à la conservation des étalons.
Avant de commencer, il est nécessaire de vérifier que les règles et politiques de votre laboratoire (SOP, réglementations, directives normalisées, etc.), ainsi que les FDS et les exigences concernant l’élimination de chaque substance chimique utilisée sont bien comprises.
Utiliser le matériel correctement
La plupart des méthodes définissent les composés et les concentrations à obtenir mais elle ne donnent généralement aucune indication sur la meilleure manière de mélanger les étalons. Pour obtenir une bonne courbe d'étalonnage, la première étape consiste à bien connaître son matériel et à savoir l’utiliser correctement. Cela peut sembler évident mais une bonne connaissance du fonctionnement du matériel et l’utilisation des bonnes techniques de laboratoire ne devraient jamais être considérées comme acquises. Prenez le temps de vous familiariser avec les outils à votre disposition et de vous entraîner à les utiliser correctement jusqu’à ce que vous vous sentiez à l’aise techniquement. Le fait d’avoir utilisé un appareil semblable auparavant ne signifie pas que le nouvel outil fonctionne de la même manière.
Les pipettes automatiques en sont le parfait exemple : elles font toutes la même chose mais pas toujours de la même manière et l’expérience avec un modèle ne s’applique pas forcément à l’autre (Figure 1). Voici quelques petites choses, mais qui ont leur importance, à prendre en compte pour préparer des solutions étalons pour les courbes d'étalonnage.
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Pipettes à déplacement d'air ou déplacement positif
Les pipettes à déplacement d’air sont sensibles à la pression de vapeur du liquide mesuré. Elles sont habituellement étalonnées avec de l’eau, donc si vous utilisez des pipettes à déplacement d’air pour mesurer le volume d’un liquide ayant une pression de vapeur supérieure ou inférieure, le volume sera différent de ce qu'indique la pipette. Si vous avez besoin d’un volume exact et précis d’un liquide ayant une pression de vapeur différente de l’eau, choisissez une pipette à déplacement positif ou n’oubliez pas de compenser la différence en étalonnant votre pipette à déplacement d’air avec un gravimètre pour obtenir les paramètres appropriés pour le liquide concerné. -
Pipettes manuelles ou électroniques
Les pipettes manuelles exigent de la régularité de la part de l’utilisateur. Il est essentiel de régler le volume de la pipette et de faire en sorte qu’il ne varie pas d’une aliquote à l’autre pour obtenir des résultats homogènes car la moindre rotation ou le moindre sursaut peuvent suffire à modifier le réglage du volume. Il est également nécessaire d’appliquer toujours la même pression sur le piston aux points de résistance, lors de l’aspiration et de la distribution des fluides. Les pipettes électroniques sont moins sujettes à la "dérive" pendant la manipulation mais elles imposent le rythme de travail et l’utilisateur doit suivre leur cadence.
Figure 1 : Il existe de nombreux modèles de pipettes différents, notamment des pipettes manuelles ou électroniques, à déplacement d’air ou à déplacement positif. Les tailles de corps peuvent sembler similaires, donc il est important de vérifier que la gamme de volumes et le type d’embout sont corrects.
Pipettes à déplacement d’air, actionnement électronique | Pipettes à déplacement positif, actionnement manuel |
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Types d’embouts
Il est extrêmement important que le type d’embout corresponde au type de pipette. Le fait qu’un embout se raccorde à une pipette donnée n’implique pas forcément qu’il s’agisse de l’embout adéquat. Les embouts ont généralement un code de couleurs mais il est toujours utile de vérifier que le type d’embout correspond à la pipette. -
Étalonnage
Les pipettes ne restent pas étalonnées indéfiniment. Elles doivent être étalonnées régulièrement par un professionnel en fonction des besoins ou des exigences de chaque laboratoire, et conformément au programme de gestion de la qualité de chaque organisme. Il est toujours utile de vérifier l'étalonnage de la pipette avec de l’eau et un gravimètre avant l'utilisation. -
Mouillage de l’embout
Les pipettes à déplacement positif ont tendance à emprisonner des bulles d’air lors de leur premier remplissage. Il peut donc être utile de les vider et de les remplir plusieurs fois avant l’utilisation pour évacuer les bulles qui modifient le volume distribué. En outre, en raison d’un effet de mouillage, les embouts des pipettes à déplacement d’air peuvent présenter un volume légèrement différent lors du premier remplissage par rapport aux mesures suivantes. Il est donc nécessaire d’être régulier dans la technique. -
Technique de pipetage
La plupart du temps, les embout de pipettes doivent être placés juste en dessous de la surface du liquide. Si la pipette est insérée trop profondément dans le liquide, un peu de fluide supplémentaire peut entrer dans la pipette avant l’aspiration, augmentant ainsi le volume mesuré. La pipette doit toujours être maintenue perpendiculairement à la surface du liquide, sans former d’angle. Lors d’une étude interne où nous avons comparé la bonne et la mauvaise technique de pipetage, la mauvaise technique de pipetage entraînait un écart type neuf fois supérieur (Figure 2).
Figure 2 : Réduire les erreurs au minimum en utilisant la bonne technique de pipetage : l’embout doit toujours être maintenu perpendiculairement et juste en dessous de la surface du liquide. Tout positionnement angulaire ou plus profond sous la surface peut générer des volumes inexacts.
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Remplacement de l'embout de la pipette
La plupart du temps, les embouts de pipettes doivent être remplacés après chaque utilisation car leur réutilisation peut introduire des contaminants dans les mesures suivantes. Si vous pensez que l’embout peut avoir été contaminé, jetez-le. -
Plage de volumes
Il est préférable d’éviter l’extrémité basse de la plage de volumes de la pipette pour réduire les risques d’erreur. Choisir également la pipette dont la plage est la plus proche du volume à distribuer. Par exemple, si vous devez distribuer 10 μl et que vous avez le choix entre une pipette de 1 à 10 μl et une de 10 à 100 μl, choisissez la pipette de 1 à 10 μl car la marge d’erreur de cette pipette est normalement inférieure à celle de la plus grande pipette pour une aliquote de 10 μl. -
Éviter de distribuer de très faibles volumes pour les solutions concentrées
Si une solution-mère concentrée est diluée pour atteindre les différents niveaux d'étalonnage et que les volumes nécessaires pour obtenir des étalons faiblement concentrés sont très faibles, la confection d’une solution intermédiaire permet de diluer une plus grande aliquote afin d’obtenir les solutions-étalons les moins concentrées.
Quels autres matériels de laboratoire sont régulièrement utilisés pour préparer les solutions étalons de courbes d'étalonnage ? Les agitateurs-mélangeurs vortex et les bains à ultrasons sont fréquemment employés pour mélanger les étalons. Mais pour garantir l’homogénéité, ils doivent être utilisés correctement. Par exemple, avec un agitateur-mélangeur vortex, l’espace à l’intérieur du flacon doit être suffisant pour que la solution se mélange efficacement. La formation d’un petit tourbillon dans le liquide indique que l’espace est suffisant pour que le mélange soit optimal. Le mélange peut aussi être secoué ou passé aux ultrasons mais le processus est plus long. Attention, les composés thermiquement labiles peuvent se dégrader dans un bain à ultrasons car la solution peut chauffer pendant la sonication. Si vous avez des questions concernant le matériel, consultez vos collègues, les manuels, les ressources en ligne ou les vendeurs d’instruments pour obtenir les réponses et apprendre à utiliser correctement le matériel nécessaire pour préparer les solutions étalons.
Tenir compte des problèmes de stabilité
Pour préparer des solutions étalons de travail, les produits de départ utilisés doivent toujours être de grande qualité et formulés de manière à garantir la stabilité. Sur le site internet Restek, vous trouverez facilement des solutions-mères stables et des mélanges sur mesure spécifiques pour votre liste d’analytes cibles. Certains fabricants d'étalons de référence, comme Restek, obtiennent la certification ISO pour confirmer que des procédures sont en place pour garantir que la concentration indiquée sur l’étiquette soit exacte jusqu’à la date d’expiration du produit (dans la mesure où il est conservé et manipulé conformément aux instructions de l'étiquette).
Toutefois, lorsqu’un étalon est ouvert et mélangé avec d’autres étalons ou avec des solvants, des réactions chimiques peuvent se produire au fil du temps et provoquer une dégradation qui réduit l’homogénéité des étalons préparés au fil des jours ou même des heures. La Figure 3 montre comment la carboxine, un pesticide dont la formule est stable en solution-mère au moment de l’achat, peut se dégrader au fil du temps lorsqu’elle est mélangée pour faire une solution étalon pour l’analyse de pesticides multi-résidus.
La sensibilité à la température ou à la lumière doit également être prise en compte, surtout pour la conservation. Il est indispensable de savoir combien de temps les nouveaux mélanges restent stables, afin d’être sûr d'avoir des courbes d'étalonnage exactes lorsqu’ils seront utilisés. Des études de stabilité doivent être réalisées à l’avance pour savoir exactement comment les étalons de travail doivent être conservés et manipulés, et pendant combien de temps ils donneront des résultats quantitatifs précis et exacts. Attention, des concentrations différentes peuvent entrainer des vitesses de dégradation différentes.
Figure 3 : Dégradation de la carboxine dans une solution étalon préparée pour l’analyse de pesticides multi-résidus (concentration de départ : 1 ppb).
En plus de la stabilité, la solubilité des analytes peut poser problème. Si certains composés ne sont pas assez solubles dans le solvant de dilution cela peut entraîner de sérieux problèmes d’étalonnage. Les propriétés chimiques des analytes doivent être vérifiées pour confirmer que les composés et leurs diverses concentrations d'étalonnage seront à la fois solubles et stables dans les solutions préparées.
Mettre en place un mode opératoire sûr
Le fait de rédiger un mode opératoire avant de préparer les solutions étalons pour les courbes d'étalonnage permet de travailler plus efficacement au laboratoire. L’utilisation d’un tableur contenant les volumes et les concentrations pré-calculés pour documenter les étapes du mode opératoire est une bonne pratique qui permet de ne pas oublier d'étape ni d’ajouter de quantités erronées. C’est une bonne manière de planifier à l’avance les quantités nécessaires de substances chimiques et de solvants, et d’imaginer la procédure avant de l’exécuter.
L’ajout d’un tableur avec un code de couleurs au mode opératoire permet de fournir facilement un niveau de sécurité supplémentaire. Utiliser les couleurs pour relier entre eux les matériaux de référence, les solutions-mères concentrées et les étalons terminés aux différents niveaux de concentration. Il est facile de se tromper de flacon ou d’ampoule lorsqu’ils se ressemblent tous. Si les couleurs des cellules du tableur correspondent aux étiquettes ou aux capuchons utilisés dans le laboratoire, les risques d’erreur sont réduits au minimum. Lorsque le mode opératoire est prêt, il suffit de l’imprimer, de l’apporter au laboratoire et de le garder devant soi pendant que l’on travaille (Figure 4).
Figure 4 : L’utilisation d’un mode opératoire pré-calculé avec un code de couleurs pour la préparation des solutions étalons de calibration, et la manipulation des flacons dans un portoir permettent de suivre la progression des étapes pour éviter les erreurs coûteuses.
Au moment de commencer à travailler au laboratoire, vérifier toutes les quantités de substances chimiques, de solvants et de fournitures pour s’assurer que tout est présent en quantité suffisante. Ensuite, il suffit de suivre le mode opératoire créé précédemment. À chaque étape, il est recommandé d’intégrer un système permettant de garder une trace du travail réalisé. Par exemple, il peut s’agir de fabriquer 10 niveaux d'étalonnage ou plus, contenant chacun différents matériaux de référence, solutions-mères, diluants et/ou étalons internes. Dans ce cas, il est très utile de travailler avec un portoir car cela permet de déplacer les flacons dans une nouvelle rangée à chaque étape terminée, afin de savoir où en est la procédure. Les questions des collègues, les appels téléphoniques, etc. sont autant de sources d’interruption ou de distraction qui peuvent faire oublier où l’on s’est arrêté. L’utilisation d’un code de couleurs et une routine qui matérialise la progression aident énormément à éviter d’ajouter le mauvais étalon dans le mauvais niveau d’étalonnage ou même d’oublier une étape par accident.
En bref, lors de la préparation des solutions étalons pour les courbes d'étalonnage, il est essentiel de réduire les sources d’erreurs au minimum pour obtenir une quantification exacte. En faisant attention aux stratégies abordées ici (et en posant des questions si nécessaire), il est possible d'éviter les problèmes et d’obtenir de bons résultats. Le temps passé à se familiariser avec le matériel et à acquérir la technique adéquate, à comprendre les limites de stabilité et de solubilité et à mettre au point un mode opératoire sûr est un bon investissement qui améliorera l'exactitude des résultats analytiques.
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